le pouvoir infectieux du prion varie en fonction de son agencement spatial

Chez une même espèce animale, le pouvoir infectieux du prion varie significativement en fonction de son agencement spatial

Pour la première fois, une équipe de chercheurs de l'INRA de Jouy-en-Josas montre que le pouvoir infectieux des particules du prion varie significativement en fonction de leur agencement spatial, propre à la souche infectante. Chez l'espèce animale étudiée par les chercheurs, le mouton, les particules de prion les plus infectieuses se sont révélées parfois être les plus petites, une propriété directement liée à cet agencement spatial. Ces résultats ouvrent la voie à de nouvelles recherches sur la compréhension de la dynamique de transmission et de propagation du prion pathologique chez l'hôte. L'ensemble de ces résultats est publié dans la revue PLoS Pathogens datée du 15 avril 2010.

Le prion est une protéine qui a acquis un pouvoir pathogène en adoptant un repliement « anormal ». Chez les mammifères, les prions sont responsables de la survenue des encéphalopathies spongiformes transmissibles (EST) ou maladies à prion. Parmi les EST les plus connues, on peut citer, chez l’homme les différentes formes de la maladie de Creutzfeldt-Jakob et, chez l’animal, la tremblante du mouton et de la chèvre, ainsi que l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB). L’ensemble de ces maladies se caractérise par une dégénérescence du système nerveux central (cerveau et moelle épinière) liée à la propagation ou multiplication des prions chez l’hôte infecté. Sur le plan anatomique, on observe ainsi au niveau du cerveau la formation de vacuoles (ce qui lui donne un aspect spongieux), une mort des neurones, et l'accumulation de particules constituées de la protéine prion de l’hôte anormalement repliée.

Distribution différentielle du prion dans le cerveau entre 2 souches
Distribution des particules de protéine prion pathologique sur des coupes de cerveau pour 2 souches de prions différentes.

De la même manière que pour les autres agents pathogènes (bactéries, virus, etc.), différentes souches de prions existent au sein d’une même espèce animale, dont le déterminisme moléculaire résiderait dans des variations du repliement de la protéine prion pathologique. Bien que ce soit le repliement anormal de la protéine prion qui soit responsable de la pathologie, peu d’informations sont aujourd’hui disponibles sur les liens existants entre le pouvoir infectieux et l'agencement spatial des protéines pathologiques (c'est-à-dire leur nombre et leur structuration) sous forme de particules responsables de l’apparition de la maladie.

Les chercheurs de l’INRA de Jouy-en-Josas se sont intéressés au pouvoir pathogène de 8 souches distinctes de prions de mouton et de hamster. Ils ont d’abord analysé la vitesse de migration dans un milieu visqueux de différentes particules de protéine prion pathologique. Ils ont ensuite étudié le pouvoir infectieux de chaque entité chez la souris. Pour quatre souches dites rapides , les particules les plus infectieuses présentent des propriétés de migration réduites, suggérant une petite taille et/ou une faible densité . Ces particules se séparent physiquement de la majorité des particules de protéine prion pathologique résistantes aux protéases (la résistance aux protéases est classiquement utilisée comme marqueur diagnostique de la maladie). De plus, elles apparaissent comme étant spécifiques de souches de prions qui s’avèrent rapidement mortelles chez l’hôte receveur.

L’ensemble de ces résultats suggère que le caractère infectieux des particules prions varie significativement en fonction de l’agencement spatial des protéines prion pathologiques sous forme de particules, tout en dépendant de la nature de la souche. Ces travaux constituent une première étape dans la caractérisation des particules infectieuses, et dans la compréhension des mécanismes qui régulent la dynamique de propagation dans le cerveau et le pouvoir pathogène des prions de mammifères. Une meilleure connaissance de la diversité des particules de protéine prion pathologique pourrait également déboucher vers une amélioration des méthodes de détection de ces agents, notamment ceux responsables des formes atypiques de la maladie.

Référence :

The physical relationship between infectivity and prion protein aggregates is strain dependent. PLoS Pathogens, 15 avril 2010.

Philippe Tixador, Laëtitia Herzog, Fabienne Reine, Emilie Jaumain, Jérôme Chapuis, Annick Le Dur, Hubert Laude and Vincent Béringue

INRA (Institut National de la Recherche Agronomique)
 UR892, Virologie Immunologie Moléculaires
 F-78350 Jouy-en-Josas, France

Date de création : 26 juillet 2011 | Rédaction : V. Béringue, H. Laude