Elise Bruder (équipe Virus Influenza) a le plaisir de vous convier à sa soutenance de thèse intitulée "Étude de l'implication de PB1-F2 dans la pathogénicité, l'émergence et la transmissibilité des virus influenza de type A". Ce travail de thèse a été réalisé sous la direction de Christophe Chevalier au sein de l’équipe Virus Influenza de l’unité VIM.
La soutenance aura lieu le mercredi 9 octobre 2024 à 14H00 dans l'amphithéâtre Jacques Poly du bâtiment 440 à l’INRAE de Jouy-en-Josas.
Le jury sera composé de :
Nadia NAFFAKH, Directrice de recherche, Institut Pasteur - Rapporteure
Olivier TERRIER, Directeur de recherche, Université Claude Bernard Lyon 1, CNRS - Rapporteur
Mariette DUCATEZ, Directrice de recherche, ENVT, INRAE - Examinatrice
Daniel MARC, Chargé de recherche, INRAE - Examinateur
Résumé :
Les virus Influenza de type A (VIA), représentent un problème majeur en santé publique et vétérinaire. Ils apparBennent à la famille des Orthomyxoviridae et possèdent un génome ARN segmenté de polarité négaBve qui favorise les réassorBments (échange de segments génomiques) et la dérive anBgénique (mutaBons due à l’absence de relecture de la polymérase). Ces processus parBcipent à la stratégie d’échappement des virus face au système immunitaire de l’hôte.
Les VIA aviaires émergent régulièrement, causant des épizooBes aux lourdes conséquences économiques, notamment dans les filières avicoles (551 millions de volailles aba\ues entre 2005 et 2023). Leur capacité à infecter divers hôtes et à franchir les barrières d'espèces mainBent la menace de l’émergence de souches à potenBel zoonoBque doté d’une transmission interhumaine efficace, donc potenBellement pandémique.
Parmi les protéines virales, les facteurs de virulence comme PB1-F2 parBcipe à la pathogénicité des souches émergentes et jouent ainsi un rôle clé dans l’adaptaBon à un nouvel hôte. Découverte en 2001, PB1-F2 est une peBte protéine intrinsèquement désordonnée de 90 acides aminés. Elle est associée à l’exacerbaBon de la pathogénicité chez les mammifères, bien que ses mécanismes d’acBon restent flous et sa foncBon inconnue, notamment chez l’hôte naturel des VIA : les oiseaux aquaBques. Non essenBelle à la réplicaBon virale, PB1-F2 est foncBonnelle dans 95 % des souches aviaires, mais ce\e foncBonnalité est souvent perdue lors du passage à l’hôte mammifère par la troncaBon de son domaine carboxy-terminal, qui s’accompagne généralement d'une a\énuaBon du virus. Les épidémies saisonnières humaines sont moins sévères lorsque la souche circulante n’exprime pas PB1-F2.
Depuis 2013, les réassortants H5Nx du clade 2.3.4.4b, dérivés de la souche A/Goose/Guangdong/1/96 (H5N1), se diversifient par vagues de réassorBment, avec un remplacement du segment N1 par d'autres (N2, N3, N5, N6, N8 et N9). Durant l'hiver 2016-2017, l’Europe a subi sa plus grande épidémie d’IAHP enregistrée, avec la co- circulaBon de deux souches H5N8: l’une exprimant une PB1-F2 foncBonnelle de 90 aa (souche Poland) et l’autre non foncBonnelle de 11 aa (souche Tarn).
La souche Tarn, responsable de lourdes pertes économiques dans le sud-ouest de la France (6,8 millions de canards aba\us).
Ce contexte de VIA aviaire engendrant une forte mortalité chez le canard et n’exprimant pas PB1-F2 pourrait suggérer une pré-adaptation à l’hôte mammifère et un potentiel zoonotique. Comprendre l’implication de PB1-F2 dans le franchissement des barrières d’espèces, la transmissibilité et la pathogénicité est essentiel afin de mieux prédire l’émergence de souches pandémiques.
Le domaine carboxy-terminal de PB1-F2 issue de la souche Poland contient des motifs d’acides aminés décrits dans la littérature pour être associés à l'exacerbation de la pathogénicité chez les mammifères. On retrouve partiellement ces motifs dans la souche Poland. Un panel de protéines PB1-F2 issues de la souche Poland de séquence sauvage ou mutante pour les motifs impliqués dans la pathogénicité ainsi que des versions tronquées de PB1- F2, ont été instillées dans un modèle de souris transgénique NFkB-luciférase pour quantifier l'inflammation par imagerie in vivo. La capacité de PB1- F2 à former des fibrilles amyloïdes, structure associée à une pathogénicité accrue chez la souris, a été vérifiée. Des analyses qPCR des poumons ont complété l'étude de la réponse inflammatoire induite par la protéine recombinante.
En parallèle, les virus Poland porteurs des mutations décrites et la souche Tarn ont été produits par génétique inverse pour examiner leur impact sur la réponse inflammatoire lors d'infections grippales chez la souris. Le recrutement cellulaire et les cytokines produites au niveau pulmonaire ont été caractérisés par cytométrie en flux et test ELISA. Les virus H5N8, moins virulents que les souches mammifères, sont peu adaptés au modèle murin, mais PB1-F2 contribue à augmenter l'inflammation post-infection. Les tests de transmissibilité chez le furet ont confirmé la faible adaptation des H5N8 aux mammifères.
Ces résultats enrichissent la compréhension du mécanisme d’action de PB1-F2 et de son rôle dans l’équilibre entre pathogénicité et fitness viral.
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“Implication of PB1-F2 protein in pathogenicity, emergence, and transmissibility during influenza A viral infection.”. It was carried out under the supervision of Christophe Chevalier in the Flu team.
The jury will be composed of:
Nadia NAFFAKH, Research Director, Institut Pasteur - Rapporteur
Olivier TERRIER, Research Director, Université Claude Bernard Lyon 1, CNRS - Rapporteur
Mariette DUCATEZ, Research Director, ENVT, INRAE - Examiner
Daniel MARC, Research Associate, INRAE Val de Loire - Examiner
Abstract:
Influenza A viruses (IAVs) represent a major public health and veterinary concern. They belong to the Orthomyxoviridae family and possess a segmented, negative-sense RNA genome, which promotes reassortment (exchange of genomic segments) and antigenic drift (mutations due to the lack of polymerase proofreading). These processes allow the viruses to evade immune defenses.
Avian IAVs regularly emerges, causing epizootics with severe economic consequences, particularly in the poultry industry (551 million poultry culled between 2005 and 2023). Their ability to infect various hosts and cross species barriers sustains the threat of the emergence of strains with zoonotic potential capable of efficient human-to-human transmission, thus posing a pandemic risk.
Among the viral proteins, virulence factors such as PB1- F2 influence the virulence of emerging strains and play a key role in adaptation to a new host. Discovered in 2001, PB1-F2 is a small, intrinsically disordered protein of 90 amino acids. It is associated with the exacerbation of pathogenicity in mammals, although its mechanisms of action remain unclear, and its function is unknown, particularly in the natural hosts of IAVs: aquatic birds. PB1-F2 is not essential for viral replication and is functional in 95% of avian strains, but this functionality is often lost when the virus crosses over to mammalian hosts due to truncation of its C-terminal domain, which generally accompanies virus attenuation. Human seasonal epidemics are less severe when the circulating strain does not express PB1-F2.
Since 2013, H5Nx reassortants of clade 2.3.4.4b, derived from the H5N1 strain, have diversified through waves of reassortment, with the N1 segment being replaced by others (N2, N3, N5, N6, N8, and N9). During the winter of 2016-2017, Europe experienced its largest recorded HPAI (Highly Pathogenic Avian Influenza) outbreak, with the co-circulation of two H5N8 strains: one expressing a functional 90 aa PB1-F2 (Poland strain) and the other non-functional 11 aa PB1-F2 (Tarn strain). The Tarn strain, responsible for significant economic losses in southwestern France (6.8 million ducks culled), suggests that the context of avian IAVs causing high mortality in ducks and not expressing PB1-F2 could indicate a pre-adaptation to mammalian hosts and a zoonotic potential.
Understanding the role of PB1-F2 in crossing species barriers, transmissibility, and pathogenicity is essential to better predict the emergence of pandemic strains. Specific motifs in the C-terminal domain of PB1-F2, described in the literature as being associated with the exacerbation of pathogenicity in mammals, are partially present in the Poland strain.
A panel of PB1-F2 proteins derived from the Poland strain, either in wild-type sequence or mutated at residues believed to be involved in pathogenicity, as well as truncated versions of PB1-F2, were studied in a transgenic NFkB-luciferase mouse model to quantify inflammation through in vivo imaging. qPCR analyses of the lungs complemented the study of the inflammatory response induced by the recombinant protein. The ability of PB1-F2 to form amyloid fibrils, a structure associated with increased pathogenicity in mice, was also investigated. In parallel, Poland viruses carrying the described mutations and the Tarn strain were produced through reverse genetics to examine their impact on the inflammatory response during influenza infections in mice. Cellular recruitment and cytokines produced in the lungs were characterized by flow cytometry and ELISA tests. The H5N8 viruses, less virulent than mammalian strains, are poorly adapted to the murine model, but PB1-F2 contributes to increased post- infection inflammation. Transmission tests in ferrets confirmed the poor adaptation of H5N8 to mammals.
These results enhance the understanding of the mechanism of action of PB1-F2 and its role in the balance between pathogenicity and viral fitness.